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5 June 2025

Fonds ESG : quelles sont les nouvelles règles de l'ESMA et leurs impacts en 2025 ?

Alors qu’à compter de la fin du mois de mai 2025, les fonds non conformes aux nouvelles règles de l’ESMA (European Securities and Markets Authority) sont pénalisables, cette article propose une synthèse approfondie des divers documents publiés par le régulateur européen.

Depuis quelques années, l’essor de l’ESG a suscité un intérêt croissant, conduisant certains acteurs à intégrer ces critères dans leur communication afin d’attirer davantage de capitaux, parfois au détriment de la transparence et de la rigueur méthodologique. Ainsi, des fonds se revendiquant « durables » peuvent intégrer dans leur portefeuille des entreprises actives dans les énergies fossiles, en contradiction avec l’objectif affiché.

Cet article a pour objectif de retracer l'origine et la nécessité des recommandations émises par l'ESMA. Il s'articule autour d’un triple mouvement : d’une part, l’analyse du contexte et des constats ayant conduit à la formulation de ces recommandations ; d’autre part, l’examen détaillé de leur contenu et de leur portée et enfin, de leurs implications et conséquences déjà observables.

Quelques définitions des acronymes utilisés dans l’article : 

  • ESMA (European Securities and Markets Authority) : autorité de régulation et de surveillance des marchés financiers de l'UE.
  • ESG : acronyme pour Environnemental, Social et de Gouvernance, les critères ESG sont des critères de mesure des investisseurs pour évaluer la prise en compte d’une entreprise des aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance dans ses activités.
  • Fonds ESG : fonds d'investissement composé de titres d'entreprises évaluées en prenant en compte des critères extra-financiers, c'est-à-dire qui vont au-delà des simples critères financiers, on parle ici de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance.
  • Fonds AIF : se réfère à des types de fonds dit Alternative Investment Fund” encadrés réglementairement et qui regroupent une large gamme de fonds non traditionnels, offrant des stratégies d’investissement diversifiées, souvent utilisées pour la recherche de rendement ou de diversification au sein d’un portefeuille.
  • Fonds OPCVM (UCITS): se définit comme un véhicule de placement collectif qui investit principalement dans des instruments financiers liquides (actions, obligations, instruments monétaires) et respecte des règles strictes en matière de diversification, de transparence et de gestion des risques. UCITS veut dire Undertakings for Collective Investment in Transferable Securities, et se traduit par OPCVM en français (Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières).

 

Pourquoi les fonds choisissent-ils une appellation écoresponsable et durable ?

L’article « Fund names: ESG-related changes and their impact on investment flows » publié par l’ESMA le 10 avril 2025[1]  partage quelques résultats intéressants : 

Usage croissant des termes ESG dans les noms de fonds

Le nom d’un fonds constitue un signal stratégique essentiel pour les investisseurs, influençant leurs choix et reflétant les priorités de gestion. Entre 2018 et 2024, pas moins de 1 834 fonds ont modifié leur appellation afin d’y intégrer un terme en lien avec l’ESG (environnement, social, gouvernance), soit environ 2,5 % de l’ensemble des fonds enregistrés dans l’Union européenne. Cette tendance traduit une volonté croissante d’afficher un engagement responsable. D’ailleurs, la part des fonds arborant un terme ESG dans leur nom est passée de moins de 3 % avant 2015 à près de 9 % en 2024. Cette progression est largement portée par les fonds OPCVM, dont 15 % utilisent désormais une terminologie liée à l’ESG.

Effets sur les flux d’investissements

Ajouter un terme ESG au nom d’un fonds a un impact direct et mesurable sur les flux d’investissement. En moyenne, les fonds qui adoptent une telle dénomination enregistrent une hausse de 2,2 % des flux nets au trimestre du changement ainsi qu’au trimestre suivant. Sur une période d’un an, cet effet s’accumule pour atteindre environ +8,9 %, témoignant de l’attractivité accrue générée par une orientation ESG affichée.

Cet effet est cependant loin d’être uniforme selon la dimension ESG mise en avant. Les termes liés à l’environnement (le "E" de ESG) se révèlent particulièrement puissants, avec une augmentation des flux nets atteignant +16 % sur un an. En revanche, les termes associés aux aspects sociaux ou de gouvernance (S/G), ainsi que les références à la "durabilité" (sustainability), ne suscitent pas de hausse significative des investissements.

Évolution des termes utilisés

Depuis 2021, le terme « ESG » est devenu le plus couramment utilisé dans les changements de nom de fonds, représentant 40 % des ajouts. D’autres termes comme « transition », « impact » ou « climat » ont également gagné en popularité au cours de cette période. En revanche, l’usage de mots liés à la durabilité a légèrement décliné depuis 2022.

Quelques chiffres clés de l’étude réalisée par l’ESMA sur les fonds AIF domiciliés en Europe entre 2009 et 2024 :

Quelles sont les recommandations proposées par la nouvelle réglementation de l'ESMA ?

Afin de lutter contre le greenwashing et garantir une meilleure transparence pour les investisseurs, l’ESMA a publié en mai 2024[2] des lignes directrices encadrant l’usage de termes ESG et durables dans les noms des fonds.

Critères principaux (applicables aux fonds OPCVM et AIF)

1. Seuil d’investissement minimum : 80 %

Tout fonds utilisant un terme ESG, de durabilité, d’impact ou de transition dans son nom doit investir au moins 80 % de ses actifs dans des investissements alignés avec ces caractéristiques ou objectifs environnementaux ou sociaux selon le cadre méthodologique de la SFDR[3].

2. Termes liés à l’impact

Pour utiliser le mot « impact », les fonds doivent démontrer une intention mesurable de générer un impact environnemental ou social positif en plus du rendement financier.

3. Termes liés à la transition

  • Un nouveau cadre s’applique aux termes comme « améliorations », « progression », « transformation », « évolution » et les mots connexes :
  • 80 % d’investissement minimum dédiés à atteindre des objectifs environnementaux ou sociaux ou des objectifs d'investissement durable
  • Application des critères d’exclusion CTB[4] (moins stricts que ceux du PAB[5])
  • Nécessité de démontrer un chemin mesurable vers la transition.

 

Critères d’exclusion obligatoires

Tous les types de fonds sont concernés, quel que soit leur format (ouvert, fermé, indiciel ou synthétique). Les règles s’appliquent sur la base des disclosures SFDR, y compris pour les dérivés, et l’usage des termes ESG doit rester cohérent et justifié par la documentation réglementaire.

La méthodologie CIA (Carbon Impact Analytics) de Carbon4 Finance permet aux financiers de répondre aux exigences des benchmarks PAB et CTB en plus des PAI climat de la SFDR. Effectivement, les intensités, les émissions scopes 1, 2 et 3 ainsi que la description des activités, la part verte et brune, les trajectoires de décarbonation en plus de la performance et données ESG annexes sont disponibles dans CIA. 

 

Synthèse des nouvelles règles ESMA sur les noms de fonds ESG et durables[6][7]

Quel est le calendrier de publication ?

En France, l’AMF (Autorité des marchés financiers) a confirmé en janvier 2025 que ce calendrier est pleinement applicable. Elle a précisé qu’à compter de mai 2025, les fonds non conformes ne pourront plus utiliser ces appellations dans leur nom.

Afin de mieux aligner ses fonds à cette nouvelle réglementation, Carbon4 Finance fournit des données et méthodologies rigoureuses et transparentes. Contactez-nous pour en savoir plus.

 

Quelles sont les conséquences des nouvelles règles de l'ESMA pour les gestionnaires d’actifs ?

Face à l’entrée en vigueur progressive des lignes directrices de l’ESMA, de nombreux acteurs du marché ont été contraints d’adapter leur stratégie de dénomination. Plusieurs gestionnaires d’actifs de renom ont récemment modifié les noms de leurs fonds pour éviter tout risque de non-conformité.

Des ajustements massifs dans les noms de fonds

Dès janvier 2025, on a observé une vague de renommages de fonds[7], souvent discrets mais significatifs :

  • Amundi, premier gestionnaire d’actifs en Europe, a supprimé le terme « ESG » de plusieurs de ses fonds actions, notamment ceux exposés à des secteurs non conformes aux critères PAB[8].
  • BNP Paribas Asset Management a rebaptisé certains de ses fonds durables en supprimant le mot « sustainability » afin de se conformer aux exigences plus strictes associées à ce terme.
  • BlackRock a modifié les noms de 56 fonds représentants $56 milliards d’actifs supposés alignés à la transition énergétique, en remplaçant les termes « impact » ou « transition » par des formulations plus neutres, faute de pouvoir démontrer un impact mesurable.
  • Federated Hermes a modifié l’appellation de 8 de ses fonds durables afin d'être alignés à la réglementation.
  • Nordea[9] a également fait des changements. Les règles spécifiques au fonds ont été modifiées afin d'inclure les restrictions d'investissement et les critères d'exclusion requis par l’ESMA.

Ces changements reflètent une crainte généralisée d’être accusé de greenwashing, voire d’être sanctionné par les régulateurs nationaux une fois les lignes directrices pleinement applicables.

Une révision accélérée des stratégies marketing et documentaires

Outre le nom des fonds, l’ensemble de la documentation réglementaire (prospectus, fiches produits, DIC, rapports annuels) doit être mis à jour pour rester cohérent avec la dénomination. Cela représente une charge administrative lourde, notamment pour les plus grands groupes ayant plusieurs dizaines, voire centaines de fonds concernés.

Des incertitudes persistantes malgré les lignes directrices

L’article de Responsible Investor souligne que certains points restent flous[10] pour les acteurs du marché :

  • Comment évaluer concrètement les 80 % d’investissements alignés ?
  • Quels standards appliquer pour mesurer un « impact » ?
  • Faut-il adapter les fonds indiciels ou synthétiques aux mêmes exigences que les fonds actifs ?

Cette incertitude entraîne une grande prudence : certains préfèrent supprimer purement et simplement les termes ESG de leurs produits, par sécurité, quitte à renoncer à une différenciation commerciale précieuse.

Enfin, chaque autorité nationale[11] n’entend pas appliquer les règles de l’ESMA de manière uniforme et chacun ne prévoit pas les mêmes sanctions. En effet les mesures envisagées par chaque autorité nationale en avril 2025 sont les suivantes :

Quelles sont les sanctions en cas de non-conformité ? 

Conclusion

L’étude menée par l’ESMA met en lumière l’essor rapide des fonds intégrant des termes liés à la durabilité, ces derniers étant devenus particulièrement attractifs pour les investisseurs. Cette dynamique souligne l’urgence d’une réglementation claire et harmonisée à l’échelle européenne, afin de garantir une réelle transparence et d’éviter les dérives. 

En effet, de nombreux fonds se contentent aujourd’hui d’un changement de nom sans ajuster leur composition ou leur stratégie, ce qui alimente les risques de greenwashing. Dans ce contexte, l’alignement sur les critères des indices de transition climatique (CTB) et alignés sur l’accord de Paris (PAB), déjà bien identifiés par les acteurs du secteur, constitue une mesure rigoureuse et sans coûts additionnels en ressources et expertise pour encadrer l’usage des termes liés à la durabilité. 

Face à ces évolutions, les autorités nationales commencent à adapter leurs exigences, renforçant ainsi le besoin pour les acteurs financiers de s’équiper d’outils fiables. 

Carbon4 Finance accompagne les financiers avec des méthodologies transparentes et complètes, leur permettant ainsi de répondre aux recommandations européennes et aux réglementations nationales. Contactez-nous pour en savoir plus.

 


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